Les entretiens

Sou Abadi - Portrait D.G.

Dans l’œil de Sou ABADI : la poésie et l’humour dans le cinéma iranien


Daniel DELANOË

Daniel Delanoë est psychiatre, psychothérapeute, anthropologue, responsable de l’Unité Mobile Trans-Culturelle, EPS Barthélemy Durand, 91152 Étampes, Chercheur associé INSERM Unité 1018, Fellow Institut Convergences Migrations (2021-2025) Maison de Solenn, Maison des Adolescents, Cochin, Paris.

Comme réalisatrice-scénariste

2002 : SOS à Téhéran (SOS Tehran) (documentaire)

2017 : Cherchez la femme

Comme monteuse

1995 : Un douze (court métrage) de Nicolas Koretzky

1997 : Le Voleur de diagonale (court métrage) de Jean Darrigol

1999 : Lettre à Emma (documentaire) de Joseph Simas

2002 : SOS à Téhéran (SOS Tehran) (documentaire) de Sou Abadi

2004 : Tabous de Mitra Farahani et Iraj Mirza

2005 : Bhaï-bhaï (court métrage) d’Olivier Klein

2008 : Les Transsexuels en Iran (documentaire) de Tanaz Eshaghian

2013 : L’Escale (documentaire) de Kaveh Bakhtiari

Pour citer cet article :

Dans l’œil de Sou Abadi : la poésie et l’humour dans le cinéma iranien. L’autre, cliniques, cultures et sociétés, 2021, volume 22, n°2, pp. 138-148


Lien vers cet article : https://revuelautre.com/entretiens/dans-loeil-de-sou-abadi-la-poesie-et-lhumour-dans-le-cinema-iranien/

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Sou Abadi est une cinéaste française d’origine iranienne. Elle a en particulier réalisé SOS à Téhéran en 2002, sur la situation des femmes en Iran, et le film Cherchez la femme en 2017, récompensé par plusieurs prix. Dans cette dernière comédie, elle développe une voie intéressante pour désarmer l’islamisme radical avec humour, délicatesse et empathie. Le film, projeté dans les collèges en Italie, en Allemagne et au Portugal, soulève l’enthousiasme, en particulier chez les élèves musulmans. Sou Abadi a passé son enfance en Iran et a dû quitter son pays quelques années après la révolution islamique. Nous l’avons rencontrée à Paris et avons évoqué avec elle sa famille, l’Iran, l’islam et la question du voile ici et là-bas. Nous avons également parlé de poésie, de cinéma et de sa rencontre déterminante avec Jean Rouch.

L’autre : Nous t’avons invitée à présenter ton film Cherchez la femme aux séminaires de la Maison des adolescents de Cochin à Paris1. Nous avons été enchantés par ta façon très originale d’aborder la question difficile et douloureuse de la radicalisation, en passant par l’humour et la poésie.

Dans ton film, Armand et Leila, étudiants à Sciences Po, forment un jeune couple. Ils projettent de partir à New York faire leur stage de fin d’études aux Nations Unies. Armand est le fils d’un père ancien communiste et une mère féministe, réfugiés politiques iraniens, et Leila est fille d’immigrés du Maghreb. Quand le grand frère de Leila, Mahmoud, revient complètement radicalisé d’un long séjour au Yémen, il la boucle à la maison. Pour tenter de s’introduire chez Mahmoud et revoir Leila, Armand se déguise et enfile le voile intégral. Le lendemain, une certaine Shéhérazade au visage voilé sonne à la porte de Leila pour lui demander des cours de français. Elle ne laissera pas Mahmoud indifférent. Armand/Shéhérazade initie Mahmoud à la poésie et à Shakespeare. De Molière à Marivaux, Mahmoud se retrouve peu à peu désarmé2.

Sou Abadi : Oui. Mais ce n’est pas par hasard que j’ai choisi d’aborder un tel sujet, il a une résonnance avec mon passé. Je suis Iranienne, j’ai vécu la révolution en Iran, une révolution qui a engendré une République islamique, même si au départ ce n’était pas du tout un mouvement religieux. Donc, ces questions-là me préoccupent depuis très longtemps. J’ai même fui l’Iran pour venir vivre en France où j’espérais que ces questions-là ne seraient même pas posées. Malheureusement, mon passé m’a rattrapée !

L’autre : En arrivant ici, tu t’es retrouvée face à un islam radical ?

SA : Pas tout de suite, même s’il m’arrivait de percevoir une certaine crispation à chaque fois que je racontais l’une de mes blagues iraniennes. Je m’explique : en Iran, l’arme la plus efficace pour résister à la République islamique, c’est l’humour. Tous les jours, il y a des blagues qui circulent contre le régime, contre les islamistes.

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  1. Séminaire « Besoin de croire », 8 janvier 2018, dirigé par Marie Rose Moro et Julia Kristeva, avec la collaboration de Brigitte Moïse-Durand et Daniel Delanoë, Maison de Solenn – Maison des adolescents, Hôpital Cochin APHP, Université de Paris.
  2. Cherchez la femme (2017). Avec Camélia Jordana, William Lebghil et Félix Moati.