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Note de terrain

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Angèle est ensorcelée ou les premiers pas d’une consultation transculturelle

Frédérique FOUQUÉFrédérique Fouqué est psychologue et psychothérapeute au centre medico-psychologique du pôle de pédopsychiatrie de Caen. Elle est également thérapeute principale de la consultation transculturelle de l’EPSM de Caen.

Caillé, A. & Prades, P. (2015). « Y croire. » Retour sur l’« efficacité symbolique ». Revue du MAUSS, 46(2), 291-318. https://doi.org/10.3917/rdm.046.0291

Favret-Saada, J. (1977). Les mots, la mort, les sorts. Gallimard.

De Rosny, E. (1981). Les yeux de ma chèvre. Plon.

Golse, B. (2014). L’intersubjectivité à la subjectivation. Un exemple de passage de l’interpersonnel à l’intrapsychique. Enfances & Psy, 62, 29-38.

Mead, M. (1963). Mœurs et sexualité en Océanie. Terre Humaine.

Moro, M. R. (1992). Principes théoriques et méthodologiques de l’ethnopsychiatrie: l’exemple du travail avec les enfants de migrants et leurs familles. Santé mentale au Québec, 17(2), 71–98.

Moro, M. R. (1994). Parents en exil. Psychopathologies et migration. PUF.

Moro, M. R. (2004). Avicenne l’andalouse. Devenir thérapeute en situation transculturelle. La pensée sauvage.

Fin 2016, la consultation groupale transculturelle du pôle de pédopsychiatrie de l’EPSM (Etablissement Public de santé Mentale) de Caen a ouvert. Cette consultation nait du désir du chef de pôle de mieux accueillir la population migrante et de ma formation, en tant que psychologue, à la clinique transculturelle via le diplôme interuniversitaire « Psychiatrie et compétences transculturelles » de Marie Rose Moro1. La mise en place d’un groupe de travail durant un an a suivi cette formation. Le groupe de consultation a choisi de recevoir sa première famille après un an d’échanges et de réflexions. Ce texte se veut la présentation d’une des toutes premières situations cliniques que le groupe de consultation a reçue, une situation qui fût pour nous, en quelque sorte, fondatrice. Il illustrera les cheminements de la famille, de l’équipe qui nous a confié cette jeune fille, et le nôtre. Nous remercions ici vivement l’équipe de première intention qui nous a fait confiance et dont nous saluons l’engagement.

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Lorsque nous rencontrons Angèle, âgée de seize ans, et sa mère, notre consultation transculturelle est ouverte depuis quelques semaines seulement. Elles nous sont adressées par l’Institut médico-éducatif (IME) qui prend en charge Angèle en semi-internat depuis plusieurs années. Angèle fait plusieurs crises de colère par jour et manifeste de l’agressivité. L’IME travaille également avec la mère d’Angèle en la rencontrant régulièrement. La mère d’Angèle – que nous appellerons Madame – est arrivée du Congo Brazzaville, fuyant la guerre, avant la conception d’Angèle. À son arrivée en France, elle est hébergée chez sa sœur en région parisienne. Rapidement enceinte et sans projet de vie commune avec le père, elle connait divers hébergements avant d’arriver finalement dans un appartement de la région caennaise. L’équipe qui la suit à l’IME se questionne sur la nature délirante, ou non, de son discours. Madame dit que la grossesse était gémellaire mais que la jumelle d’Angèle est décédée en début de grossesse, « mangée » par Angèle qui a ainsi acquis des pouvoirs. Angèle est qualifiée de clairvoyante par sa mère qui l’est elle-même. Pour les Bakongos2, Madame, en tant que mère de jumelles, a un statut particulier : elle est « Mangouri » ce qui lui confère des pouvoirs. Jeune, Madame voulait être nonne, elle en a été empêchée. Comment sa « destinée » contrariée intervient-elle dans cette filiation ? Nous avons validé l’indication au vu de la présence d’une théorie étiologique culturelle et des difficultés de l’équipe de l’IME à intégrer les éléments culturels dans la prise en charge. Madame pense que sa fille est ensorcelée, alors que, pour l’équipe qui la prend en charge, Angèle est autiste. La mère et l’équipe ne se rejoignent pas sur une représentation commune d’Angèle. Pour l’IME, Angèle a besoin de soins. Pour sa mère, Angèle a besoin de protection contre la sorcellerie. Madame se sent incomprise : « Ce n’est pas un truc que peuvent comprendre les blancs ».

Quelque temps après cette validation, nous débutons la prise en charge d’Angèle. Au début, la question du diagnostic a sous-tendu notre travail au sein du groupe comme nos liens avec l’équipe de première intention. En effet, l’équipe de l’IME était en demande de diagnostic concernant la mère, et se demandait quel statut donner au discours maternel, culturellement codé. Notre manque d’expérience dans les consultations transculturelles à fait que nous n’avions pas assez clairement exprimé à l’IME qu’en prenant en charge Angèle, nous ne nous situerions pas sur ce plan et ne répondrions pas, par conséquent, à cette question. Nous avons donc été amenés à y répondre, dans une sorte de transgression qui nous a mis fortement au travail. En effet, nous-mêmes étions pris par cette question au sein de notre groupe. Certains d’entre nous sont premiers consultants en CMP et ont l’habitude de se poser la question du diagnostic lors de la rencontre avec un nouveau patient. Le discours de la mère d’Angèle pourrait alors paraître étrange, parfois peu cohérent voire paradoxal, si nous le prenons à l’aune de nos propres représentations.

Nos premiers groupes de travail autour de cette situation étaient emplis d’échanges autour de cette question concernant la mère d’Angèle. Est-elle délirante ou son discours n’est-il « que » culturellement codé ? C’était la question même de l’équipe de l’IME qui nous habitait ! Nous essayions de tenir cette question à distance, mais quelque chose insistait et nous y ramenait constamment. D’autant plus que le fait même de se dire que cette question n’était pas la nôtre divisait notre groupe.

Les caractéristiques du dispositif transculturel (groupe, parole indirecte, regard flottant, images, décentrage, absence d’interprétations etc.) permettent d’accueillir le patient au-delà de cette question et de celle du codage culturel, dans un processus psychothérapeutique.

En effet, bien que singulier, ce dispositif s’appuie sur un corpus commun aux thérapies groupales : une enveloppe pouvant contenir et rassembler, voire organiser, des éléments névrotiques mais aussi des éléments plus précoces indifférenciés des sujets. Ainsi, le groupe permet, comme nous le rappelle Bernard Golse (2014), de vivre et travailler la question de l’intersubjectivité à partir de l’indifférenciation première. La mère d’Angèle peut alors s’appuyer sur la reconstruction de cette enveloppe culturelle pour organiser son discours.

Nous avons mis du temps à nous dégager de la question du diagnostic. C’est le temps de notre chemin vers cette mère, son monde, mais aussi vers notre groupe en constitution et vers l’appropriation de cette clinique particulière qu’est la clinique transculturelle. Celle-ci est fondée sur la notion de décentrage, c’est-à-dire la relativisation de notre savoir comme n’étant pas vérité mais une lecture du monde, au même titre que d’autres. La question du décentrage est le cœur même du travail transculturel (Moro, 2004). En nous décentrant, nous nous rappelons qu’en disant « cette femme est psychotique », nous apposons une lecture culturellement imprégnée, qui n’a de sens qu’au sein d’un paradigme donné de pensées.

Ainsi, lorsque Madame nous dit que sa fille est ensorcelée, nous accordons à son discours la même valeur qu’à un autre et sans a priori. Mais le travail va au-delà : là où la sorcellerie arrête la pensée dans une forme de sidération, comme le décrit Jeanne Favret-Saada (1977), nous allons chercher, au contraire, le sens et la narration. Cette position permettra qu’au fil des séances transculturelles, Madame déplie son récit.

Les parents de Madame sont morts alors qu’elle était en France et elle n’a pu assister à leur inhumation. Or, aînée d’une fratrie de quatre, elle avait un rôle important à y tenir. Madame a tenté de faire les rituels à distance, mais cela n’a pas été suffisant. La luxation du genou droit qu’elle s’est faite résonne, pour elle, comme une plaie liée à son absence lors de l’inhumation de son père. Une question de Madame illustre ce début de voyage avec cette famille. À l’issue de la première séance, elle me demande si les mêmes personnes seront présentes à chaque fois. Je lui dis : « Oui et ainsi vous serez en terrain connu la prochaine fois », à cela elle me répond : « Ah oui ! En terres inconnues avec Frédéric Lopez ! ». En effet, Madame a raison, la consultation transculturelle ne nous amène pas en terrain connu, mais bien en terres inconnues ! Avec la réalisation d’un arbre généalogique, nous repérons l’aspect transgénérationnel des dons de clairvoyance. La grand-mère maternelle d’Angèle en possédait elle-même. L’arbre nous éclaire sur l’aspect matriarcal de l’organisation familiale. Ainsi, Madame est en mesure, lors des séances suivantes, de parler du père d’Angèle – dont l’évocation était impossible jusqu’alors – lui-même sorcier.

La mère d’Angèle va être amenée par le groupe à énoncer sa théorie étiologique des troubles de sa fille. Angèle a été ensorcelée mais le sort sera levé et elle parlera à l’âge de vingt-deux ans. Le travail du groupe va alors consister à aider Madame à déplier sa théorie et à aller vers un récit qui intègre des éléments culturels, familiaux, généalogiques et psychiques. Lors de ce travail sur plusieurs séances, nous parviendrons à identifier les trois sorciers à l’œuvre : le père d’Angèle, l’oncle et le beau-frère de Madame. Trois hommes, donc, dont on comprend mieux qu’ils ne pouvaient être évoqués de prime abord, au risque de les convoquer, qui se connaissent et œuvrent dans le monde de la nuit. Nous nous rappelons que, dès la première séance, il avait été question de la difficulté d’Angèle à voir le jour tomber. Cette identification des trois sorciers est une étape importante car elle permet de leur faire perdre du pouvoir aux yeux de Madame. Angèle est née hors mariage et si le père ne se manifeste pas auprès de la communauté en donnant une dote, même symbolique, il manque de respect à la femme et les enfants de cette union en subiront des conséquences. On peut supposer que les oncles maternels et le grand-père ont attendu que le père d’Angèle vienne se présenter pour donner la dote. Le fait qu’il ne l’ait pas fait est une transgression, celle-ci a des effets sur Angèle : s’il n’y a pas d’alliance entre les familles, de quoi est-elle donc le fruit ?

Si le père est sorcier, cela peut expliquer, d’une part, qu’il n’ait pas donné de dote. D’autre part, cette caractéristique le lie, malgré tout, à la famille maternelle puisqu’il agit la nuit avec l’oncle et le beau-frère de Madame. On retrouve donc la fonction sociale de la sorcellerie qui est de préserver le fonctionnement du groupe, mais aussi sa fonction subjective, celle de donner un sens à la singularité d’Angèle (Favret-Saada, 1977 ;  de Rosny, 1981).

Madame a tenu à protéger le groupe avant de pouvoir déplier ce récit, comme elle se protège elle-même du mieux qu’elle le peut (sel, eau, prières etc.). Elle offre une neuvaine de protection au groupe et dit prier pour nous. En effet, en évoquant ce monde, elle craint de nous mettre en danger en provoquant la colère des sorciers.

Les relations entre la mère et la fille peuvent paraître distantes. La mère peut sembler avoir peu de préoccupation psychique pour sa fille et ceci fait partie de notre contre-transfert culturel. En effet, son monde tourne autour de sa fille, ainsi que la théorie qui soutient son rapport au monde « ma fille est ensorcelée ». Ici, la place de notre interprète est précieuse puisqu’il nous aide à nous décentrer : l’enfant chez les Bakongos n’est pas l’enfant d’un couple mais de la tribu. La façon dont Madame est en lien avec sa fille est tout-à-fait congruente avec les modalités observées dans sa communauté. Véritable médiateur culturel, l’interprète nous aide à faire ce pas de côté et à cheminer sur les deux axes principaux que tout groupe transculturel doit travailler : le décentrage et le contre-transfert culturel.

Il y va ainsi, par exemple, des sortes de baisers qu’Angèle donne à la plupart des co-thérapeutes lors de nos séances. Elle se penche vers l’un de nous, semblant demander un bisou qui doit claquer. Angèle s’assied peu. En général, elle déambule dans le cercle sur la pointe des pieds et en s’entourant d’une enveloppe sonore (comme si elle psalmodiait). Elle est réactive à ce qui se dit, pouvant souffler, s’agiter, ou au contraire s’apaiser selon les moments. La mère d’Angèle est agacée par les demandes de bisous de sa fille. Notre interprète nous expliquera que les démonstrations affectives « ne se font pas ». La mère l’exprimera d’ailleurs   plus tard : « Nous on ne fait pas 40 bisous par jour comme les Blancs ». Ce qui la gêne, donc, c’est qu’Angèle ait pris « des trucs de Blancs ». Et cela fait séparation ! Le groupe va donc aider Madame à penser la séparation avec sa fille, ce qui lui était jusqu’à présent difficile, alors même qu’Angèle, âgée de 18 ans, questionne l’IME sur sa sexualité, son contrat jeune majeur etc.

Lors d’une séance, Madame est plongée dans une grande tristesse et pleure à plusieurs reprises. Concomitamment, Angèle est joyeuse et exécute une sorte de danse. Cette dichotomie se retrouve dans le débriefing post-groupe où certains co-thérapeutes ont été traversés par la tristesse de la mère et d’autres par la joie d’Angèle. En tant que thérapeute principale, je me souviens avoir ressenti ces deux affects de façon forte et simultanée, ce qui m’a fait vivre une intense division.

La pertinence d’être en groupe est alors multiple : élaborer nos contre-transferts qui représentent des éléments cliniques majeurs, entourer, recevoir et accueillir le discours de Madame, ses angoisses, celles d’Angèle, et enfin permettre à Madame d’élaborer un récit.

L’équipe de première intention, toujours présente lors des consultations, représente également un élément fondamental dans ce travail. L’équipe de l’IME prépare les consultations avec Angèle et amène du matériel. Le lien, la collaboration entre nos deux équipes au service d’Angèle et de sa mère permet ce chemin vers le métissage et le sens.

Ainsi, sur la prédiction annoncée par la mère « Angèle va parler », nous avons tous cheminé vers une représentation commune : Angèle sera parlée. Nous avons rejoint Madame, elle-même est beaucoup plus floue sur l’âge en question et la façon dont elle parlera.

Au fil des séances, Angèle a pu entendre quelque choses de son héritage culturel et s’inscrire dans cette filiation transgénérationnelle : Angèle n’est pas que ensorcelée, elle est aussi le résultat de son histoire et de ce que Madame transmet. Angèle a pu également entendre quelque chose de son père, ce qui est nouveau et, de plus, quelque chose qui le rattache à la communauté. Les choses peuvent maintenant se métisser et non plus se cliver. Le discours de l’IME est entendu par Madame et réciproquement dans le cadre des consultations ; un discours commun émerge. Madame est repositionnée comme mère de cette adolescente et ayant donc des responsabilités vis-à-vis d’elle. Le groupe la soutient dans sa fonction maternelle. Nous l’invitons à penser l’effet des rituels de protection sur sa fille, par exemple.

Angèle elle-même change de statut dans le regard de sa mère via la consultation, elle devient une jeune femme.

Ce travail met en lumière l’efficacité symbolique du langage et des rituels (organisés par les théories étiologiques). Les rituels guérissent car ils ont une efficacité symbolique qui va au-delà de la question d’y croire. La notion de croire, d’ailleurs, se décline de multiples façons (Caillé & Pradès, 2015). Les rituels sont garants de l’appartenance du sujet au monde et l’ordonnent. Ils disent que le sujet est vivant, pensant et qu’il appartient à une communauté humaine ordonnée et régie par des règles. Ainsi la théorie de Madame, expliquant que le père d’Angèle est sorcier, donne un sens socialement et culturellement admis à la symptomatologie d’Angèle. Nous pouvons ici évoquer la notion de berceau culturel de l’enfant (Moro, 1994). Il s’agit de la manière dont est transmise la culture d’une génération à l’autre à travers le corps des bébés, par un processus bien connu depuis Margaret Mead (1963), l’enculturation. Le dispositif transculturel reconstitue une sorte de berceau culturel familier, on y constate d’ailleurs souvent un apaisement des patients.

L’une des formes du chaos est ce que nous nommons la folie, c’est-à-dire une série d’émergences non ou peu admises socialement, et souvent culturellement codées. Les rituels et le langage peuvent permettre une sortie de ce chaos. Lors de la migration les sujets sont souvent coupés de leur monde, la langue a changé et les rituels ne peuvent pas toujours être faits tels qu’ils le devraient. En outre, il n’y a parfois plus la communauté pour entourer la personne. Alors, qu’est-ce-qui va venir ordonner les choses ? Il y a donc une carence, ce qui peut constituer un élément pathogène lié à la migration.

Donner du sens est une nécessité humaine du fait même de notre subjectivité. Donner du sens protège des irruptions du réel impensable – comme la perte, la mort etc. – et que l’on retrouve parfois dans certains symptômes de nos patients (le délire étant alors une tentative d’ordonner les choses, qui peut aussi échouer à apaiser l’angoisse liée au réel). Tout ce qui est de l’ordre du soin vise à rétablir un ordre bouleversé. D’où son efficacité symbolique puisqu’un sens est donné et une logique permet de sortir subjectivement du chaos, que ce soit par la psychiatrie ou par les soins dits « traditionnels ». Dans la migration, un désordre se retrouve susceptible d’être traité dans un code culturel différent ne faisant pas sens pour le sujet. Les mots mis sur les troubles, par exemple, ne correspondent pas aux représentations du sujet, alors les choses ne peuvent être ordonnées.

La consultation transculturelle ne remplace pas la communauté mais peut faire enveloppe, contenant de ce désordre. Elle se réclame d’une position méta et va tenter de métisser les représentations des patients avec celles des équipes demandeuses, afin que de nouvelles représentations communes émergent.

Conclusion

Si la psychiatrie et la psychanalyse ne sont pas assimilables à une théorie étiologique, il n’en reste pas moins qu’elles en ont la fonction et qu’elles sont culturellement très imprégnées et codées. C’est pourquoi, si l’équipe de l’IME nous demandait de nouveau aujourd’hui si le discours de Madame est délirant, notre réponse serait tout autre. Nous répondrions que Madame croit, avec raison, que sa fille est ensorcelée. Nous répondrions cela avec sincérité et conviction, au plus près de la vérité de ces deux sujets et de l’ordre pensé pour les sortir du chaos. La consultation transculturelle est un voyage pour les patients, les thérapeutes et l’équipe de première intention. Nous sommes tous mis au travail et nous rencontrons des écueils, des coups de vent qui nous secouent et des vagues porteuses qui nous poussent en avant. Si nous acceptons de nous laisser embarquer, porter, alors nous pouvons inventer une destination commune où nos représentations se rejoignent, au service de l’apaisement des patients.

  1. Diplôme interuniversitaire de l’Université de Paris, Faculté de Santé. Pour en savoir plus, vous pouvez consulter la page dédiée au diplôme « Psychiatrie et compétences transculturelles » sur le site de l’Université de Paris
  2. Les Bakongo forment un peuple bantou d’Afrique centrale.
Résumé

Angèle est ensorcelée ou les premiers pas d’une consultation transculturelle

L’une des premières situations cliniques rencontrées par le groupe de la consultation transculturelle de Caen fut celle d’Angèle. L’équipe de l’institut médio-éducatif (IME) qui nous a adressé Angèle pensait qu’elle était autiste, alors que sa mère la disait ensorcelée. Nous développons dans ce texte l’évolution du travail psychothérapeutique afin de rendre compte de l’indication de cette famille, de la demande de l’IME et des questionnements du groupe de la consultation transculturelle. La fonction de la sorcellerie dans cette situation se dégage et permet d’élargir le propos vers la question de l’efficacité symbolique. Le texte met alors en évidence le travail de décentrage du groupe de thérapeutes et l’évolution vers des représentations métissées permises par la clinique transculturelle.

Abstract

Angèle is bewitched or the first steps of a transcultural consultation

One of the first clinical situations encountered by the transcultural consultation group in Caen was that of Angèle. The team from the Institut Médio-Educatif (IME) who referred Angèle to us thought she was autistic, whereas her mother said she was bewitched. In this text we develop the evolution of the psychotherapeutic work in order to give an account of the indication of this family, the request of the IME and the questions of the transcultural consultation group. The function of witchcraft in this situation is highlighted and allows us to broaden the subject to the question of symbolic effectiveness. The text then highlights the work of decentration of the group of therapists and the evolution towards mixed representations allowed by the transcultural clinic.

Resumen

Angela está hechizada o los primeros pasos de una consulta transcultural

Una de las primeras situaciones clínicas encontradas por el grupo de consulta transcultural de Caen fue la de Angèle. El equipo del instituto médico y educativo (IME) que nos remitió a Angèle pensó que era autista, mientras que su madre dijo que estaba embrujada. En este texto desarrollamos la evolución del trabajo psicoterapéutico para dar cuenta de la indicación de esta familia, la petición del IME y las preguntas del grupo de la consulta transcultural. La función de la brujería en esta situación se pone de relieve y nos permite ampliar el tema a la cuestión de la eficacia simbólica. A continuación, el texto destaca el trabajo de descentralización del grupo de terapeutas y la evolución hacia representaciones mixtas permitidas por la clínica transcultural.

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