Dossier
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Matières des rêves
Coordonné par Claire MESTRE et Jean-François VERVIER
Publié dans : L’autre 2014, Vol. 15, n°3
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Dans le monde de la nuit, le sommeil et les rêves nous permettent d’explorer, au-delà ou en deçà de notre réalité diurne, un univers inconnu et illimité de sensations et d’images, un espace-temps composé de façon kaléidoscopique par des éléments biologiques, psychiques, historiques et sociaux. En plus de leurs fonctions vitales et adaptatives d’apprentissage, de mémorisation et d’anticipation, les rêves fondent les bases originaires de notre psyché et entrent en écho avec notre histoire et les mythes de l’humanité.
Vulnérable dans le sommeil, l’homme vit dans ses rêves l’expérience d’une pensée autonome, consciente et inconsciente. Pour lui, le rêve est un exil intérieur, une traversée du miroir qui le confronte à l’étrangeté et à l’altérité de ses productions mentales. Ses échappées oniriques, fragmentées et complexes, constituent des énigmes, des rebus qui l’invitent à en déchiffrer les sens manifeste et latent. Expériences singulières alimentées par l’imaginaire collectif, l’interprétation des rêves est, dans de nombreuses cultures, ritualisée et s’inscrit dans une symbolique culturelle : elle inaugure un récit qui illustre pour les membres d’une même communauté une vision du monde-visible et invisible- mais aussi une conception de la personne. Dans une compréhension psychopathologique, le travail du rêve intégré aux soins psychiques participe d’une perlaboration psychique- alors que la répétition du cauchemar ou du rêve traumatique témoigne de l’échec de la mentalisation- utilisant les traces des expériences diurnes heureuses, douloureuses ou traumatiques associées aux productions de l’inconscient.
L’onirocritique, autre façon culturelle de concevoir le rêve, peut également être comprise comme une démarche d’élaboration individuelle et collective, si elle est confrontée à ce que nous comprenons sur le plan psychanalytique du travail du rêve. Ainsi, elle devient non contradictoire à la démarche de soin en soutenant la création de soi, le lien à l’autre et la transmission de l’histoire et de la culture.
Au contact de notre terre transculturelle porteuse de songes, la revue L’autre propose, dans ce dossier, un espace d’incubation de la clinique de quelques orateurs du 14e Colloque international au Luxembourg, qui a été consacré au thème « Rêves d’exil, exil des rêves » en décembre 2012. Des professionnels : cliniciens et anthropologues, nous invitent à découvrir à travers leur recherche, des pratiques du rêve dans différentes régions du monde, à comprendre comment le rêve permet d’articuler la tradition et le travail psychique, et comment il participe des actes de résistance politique dans l’Allemagne nazie.
Partageons et osons croire en leurs et nos rêves transculturels – endogènes, induits, messagers ou prémonitoires – qui déterminent nos engagements cliniques, associatifs et sociétaux !