Article de dossier
Les porteurs d’oubli
Publié dans : L’autre 2007, Vol. 8, n°1
Dossier : Peut-on oublier ?
Marion GÉRY
Marion GÉRY est psychologue clinicienne à Marseille.
Pour citer cet article :
Géry M. Les porteurs d’oubli. Une expression de la souffrance dans la migration. L’autre, cliniques, cultures et sociétés, 2007, volume 8, n°1, pp. 77-93
Lien vers cet article : https://revuelautre.com/articles-dossier/les-porteurs-doubli/
Les porteurs d’oubli. Une expression de la souffrance dans la migration
Ce travail de recherche porte sur la fabrication d’un oubli dans le cadre d’une thérapie métaculturelle et sur ses incidences psychopathologiques. L’oubli est un objet de protection, qui se glisse fréquemment dans les interstices du cadre thérapeutique. L’oubli se métamorphose en symptôme : l’oubli de parler peut devenir mutisme sélectif. Mais le symptôme vient rappeler à son tour un autre oubli : l’oubli façonné par les parents qui n’ont pas transmis à leur enfant les couleurs, les odeurs, les sons, les pensées d’un autre monde, celui-là même où il a été fabriqué et qui leur a permis d’imaginer un jour, ceux qui viendraient après eux et cela bien avant leur conception. Une observation issue de la pratique clinique vient témoigner de la manière dont une enfant a pu être tenue éloignée de l’histoire des faits et gestes de son groupe d’appartenance et de comment elle s’en est trouvée vulnérabilisée.
Mots-clés : Mutisme sélectif, objet de protection, psychopathologie de l’oubli, thérapie métaculturelle, transmission et traumatisme, vulnérabilité.
Carriers of forgetting. An expression of the suffering in the migration
This research is about forgetting, within the framework of a metacultural therapie and about some psychopathologic incidences. Forgetting is a protector object who often glides into the craks of therapeutic framework. Forgetting sometimes becomes a symptom: silence (forgetting to speak) for exemple. This symptom is here to remind us another omission, caused by parents who never hand drown colors, smells, sounds, thoughts of another world, the way they were created and in which enables one to imagine one days, those coming after them and this, long before their conception. One clinic observation explains how on children can be kept away from the history to whitch she belongs and how in this way she is extremely vulnerable.
Key words: Psychopathologic forgetting, migration, silence, traumatic transmission, choc, metacultural therapy, vulnerability.
Los portadores de olvido. Una expresión del sufrimiento en la migración
Este trabajo de investigación trata de la fabricación de un olvido en el cuadro de una terapia metacultural y de sus incidencias psicopatológicas. El olvido es un acto-objecto bifácico, que se desliza a menudo en los interticios del cuadro terapéutico. Un olvido puede metamorfosearse en síntoma, el olvido de decir puede volverse mutismo electivo. Un síntoma que viene a recordar a su vez otro olvido: olvido modelado por los padres que no transmitieron a sus hijos los colores, los olores, los sonidos, los pensamientos del otro universo, ese mismo donde habían sido fabricados y que les permitió de imaginar un día aquellos que vendrían después de ellos y eso mucho antes de su concepción. Una observación sacada de la práctica clínica testimonia aquí de la manera en que una niña pudo estar tenida alejada de la historia, de los hechos y gestos de su grupo de pertenencia y de como se encontró asi fragilizada.
Palabras-claves: Psicopatología del olvido, mutismo electivo, desdoblamiento, transmisión y traumatismo, vulnerabilidad, terapia metacultural.
J’ai d’abord pensé intuitivement qu’il y avait deux choses que les hommes ne pouvaient pas oublier sans devenir aussitôt vulnérables : leur appartenance et leur pays. Et cela même lorsqu’il leur a fallu s’exiler, comme ces seize millions d’émigrants qui sont passés de 1892 à 1924 à Ellis Island, « l’île aux larmes » où basculait leur destin, où il fallait effacer le passé pour que s’ouvre un avenir.
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