Article de dossier

© Astanze, Statues on the cemetery of Père Lachaise, Paris 2014. Source (CC BY-SA 2.0)

Laisser partir ou retenir les morts ?

Réflexion sur les relations entre les vivants et les morts chez nous et ailleurs

Laura PERICHONLaura Perichon est psychologue clinicienne. Ses centres d’intérêts sont les relations que les vivants entretiennent avec les morts suite à un deuil et les aspects anthropologiques et philosophiques du rapport actuel aux morts dans le monde moderne. Egalement ingénieure physicienne, elle a travaillé pendant plusieurs années comme chercheuse en Sciences de la Terre. Service de psychologie du développement et de la famille, Faculté des sciences psychologiques et de l’éducation, Université libre de Bruxelles (ULB), CP 122, 50 Av. F.D. Roosevelt, B-1050 Bruxelles.

Vinciane DESPRETVinciane Despret est chef de travaux au Département de philosophe de l’Université de Liège et chargée de cours à l’Université libre de Bruxelles (ULB). Elle a longtemps travaillé sur des questions d’épistémologie, majoritairement dans le domaine de la psychologie animale et de l’éthologie. Depuis quelques années, elle mène une recherche sur la manière dont les personnes maintiennent des liens avec leurs disparus et sur les pratiques et les narrations qui alimentent ces relations. Elle a dirigé le numéro « Les morts utiles » de la revue Terrain, en 2014 et publié, en septembre 2015, Au bonheur des morts. Récits de ceux qui restent, à La Découverte, dans la collection Les Empêcheurs de penser en rond. Unité de recherche Méthéor. Département de philosophie. Faculté de philosophie et lettres, Université de Liège (ULg). Bat. A1, 7 Pl. du XX Aout, B-4000 Liège.

Isabelle DURETIsabelle Duret est responsable du Service de Psychologie du Développement et de la Famille et chargée de cours à l’Université libre de Bruxelles (ULB). Elle est psychothérapeute de couple et de famille et formatrice en thérapie systémique à Forestière Asbl et à l’ULB. Ses recherches portent sur la parentalité, la filiation et la transmission intergénérationnelle dans les contextes post-traumatiques. Service de psychologie du développement et de la famille, Faculté des sciences psychologiques et de l’éducation, Université libre de Bruxelles (ULB), CP 122, 50 Av. F.D. Roosevelt, B-1050 Bruxelles.

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Perichon L, Despret V, Duret I. Laisser partir ou retenir les morts ? Réflexion sur les relations entre les vivants et les morts chez nous et ailleurs. L’autre, cliniques, cultures et sociétés, 2017, volume 18, n°1, pp. 38-46

Résumé

Laisser partir ou retenir les morts ? Réflexion sur les relations entre les vivants et les morts chez nous et ailleurs

Dans le monde moderne, bien que la pensée officielle considère que les morts n’ont d’autre existence que le néant, de nombreuses personnes entretiennent des relations avec leurs proches décédés en se laissant affecter par eux ou encore en posant des actes concrets qui leur sont destinés. A partir d’une définition du deuil comme étant la somme des actes posés par les vivants pour transformer le mort et la relation avec lui (Molinié 2006), nous observons sous l’angle de la transformation de la relation les témoignages de personnes, de chez nous et d’ailleurs, interagissant avec leurs proches décédés. Une question qui préoccupe régulièrement les personnes rencontrées est celle de « laisser partir » le mort ou de le « retenir ». Ces deux dynamiques relationnelles se traduisent par des actes et vécus spécifiques et mènent à des transformations et statuts différents des morts comme des vivants.

Abstract

Letting go or hanging on to the dead? Thoughts on relationships between the dead and the living in Western culture and elsewhere

In our modern world, although it is officially considered that the dead have no existence, a large number of people keep a very close bond with their deceased relatives, either by allowing themselves to be affected by them or by performing acts directly directed towards them. Using a definition of grief as “actions performed by those left behind to transform the dead and their relationship with themselves” (Molinie 2006), we analyze from an angle point of transforming, the narratives of bereaved subjects within our own environment or elsewhere, interacting with their deceased relatives. They often face the challenging choice of either letting go of the dead or hanging on to them. These two dynamics generate specific interactions and feelings leading to different transformations and status of both the dead and the living

Resumen

Dejar a los muertos que se vayan o retenerlos ? Reflexiones sobre las relaciones entre los vivos y los muertos en nuestro país y el extranjero

En el mundo moderno, aunque el pensamiento oficial considere que las personas fallecidas no tienen ninguna otra existencia más allá, muchas personas mantienen relaciones con sus familiares fallecidos, siendo afectados por ellos e incluso realizando acciones concretas dirigidas a ellos. Partiendo de la definición del duelo que dice que es la suma de actos que llevan a cabo los vivos para transformar al muerto y la relación que se tiene con él (Molinié 2006), obtuvimos testimonios de personas, de nuestro país y otros, las cuales transformaron esta relación para tener una interacción con sus familiares fallecidos. Una de las cuestiones que en general preocupaba a las personas que participaron es la “dejar que se vaya” o de “retenerlo”. Estas dos dinámicas de relación se traducen en actos y experiencias específicas y conllevan a transformaciones y estatus diferentes tanto de los muertos como de los vivos.

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