Hommage

© fnogues, Molí des Moliner. #Eivissa #molí #windmill #patrimoni #heritage, 28/03/2017 Source (CC BY 2.0)

Une conductrice en insoumission

Hommage : Françoise Héritier en partage


Michèle FIÉLOUX

Michèle Fiéloux est anthropologue et réalisatrice au Laboratoire d’Anthropologie sociale (CNRS), Collège de France, 52 rue du Cardinal Lemoine, 75005 Paris.

Héritier F. Masculin/féminin. La pensée de la différence. Paris : Editions Odile Jacob ; 1996.

Héritier F. Masculin/féminin 2. Dissoudre la hiérarchie. Paris : Editions Odile Jacob ; 2002.

Héritier F. Retour aux sources. Paris : Editions Galilée ; 2010.

Héritier F. Au gré des jours. Paris : Editions Odile Jacob ; 2017.

Filmographie

Fiéloux M, Lombard J. A visage découvert. 52’ 2009. Vimeo fieloux.lombard

Fiéloux M, Lombard J. Le voyage de Sib, 52’, 2005. Vimeo fieloux.lombard.

Wehn Damish T. Françoise Héritier. La pensée de la différence. Film documentaire 52’. Une coproduction Cinétévé et CNRS Images. 2008.

Pour citer cet article :

Repéré à https://revuelautre.com/hommage/une-conductrice-en-insoumission/ - Revue L’autre ISSN 2259-4566

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L’envie de réagir à propos de cette curieuse expression vient-elle de l’effet de surprise qu’elle provoqua chez moi quand je l’entendis prononcer par Françoise Héritier lors de l’émission Boomerang d’Augustin Trapenard du 23 octobre 2017[ref]France Inter. Emission Boomerang de Augustin Trapenard.[/ref] consacrée à son dernier livre Au gré des jours (2017) ou bien tout simplement de l’identité de la dénommée « conductrice », une gamine de Saint-Etienne. Cette expression s’était imposée au fil des échanges développés dans le cadre de cette émission sur le rôle d’insoumise ou le fait de le devenir à une époque où « l’on inculquait, à nous filles, l’idée que nous sommes insuffisantes, inférieures et quoique nous fassions, nous n’arriverions jamais à égaler le modèle des hommes, libres, heureux, plaisantant et qu’il nous fallait rester derrière, un peu à l’affût des quelques miettes qui pouvaient tomber de la table des grands… »[ref]Extraits de l’entretien réalisé dans l’émission Boomerang 23/10/2017.[/ref]. Françoise exprimait ses regrets « de ne pas s’être révoltée plus tôt contre les dictats familiaux qui étaient classiques pour conserver la pureté virginale des filles… C’est-à-dire, on surveillait mes horaires, on surveillait les horaires de ma sœur, on n’avait pas le droit de faire du vélo, on n’avait pas le droit d’aller nager… »[ref]Idem.[/ref]. Tout en se présentant « justement comme une insoumise », ayant commis des actes de rébellion alors qu’elle était majeure, provoquant à chaque fois « un clash familial terrible », selon ses mots. Ainsi elle décida de partir de chez elle dès qu’elle eut vingt et un ans, d’aller vivre et travailler en Afrique à vingt deux ans, de se marier en Afrique « sans ses parents », etc. En réponse à cette question : « L’insoumission, est-ce que cela s’ap-prend ? » Françoise Héritier précisa que « cela s’enseigne d’égal à égal dans la même classe d’âge. On choisit quelqu’un qui deviendra votre maître en insoumission, mais cela pourrait être une maitresse, sauf que cela fait un drôle d’effet, donc votre conductrice en insoumission ![ref]Idem.[/ref] ». Pour Françoise, ce fut une camarade de classe de 6e ou de 5e, l’une des rares dont elle se souvient : « À l’époque je ne la voyais pas ainsi ! Je ne me suis rendu compte qu’après coup qu’elle avait eu cette utilité-là (…) Elle avait plein de secrets sur les règles, le corps, et bravait un peu les professeurs ! Celle-là, oui, elle en était une, je la regardais avec méfiance, mais elle enseignait l’insoumission »[ref]Idem.[/ref]. Me reportant au portrait dressé dans Au gré des jours (Héritier 2017 : 55) je découvre que cette camarade y est très présente, mais un peu différente, plutôt « comme une chipie hargneuse, une chef de bande autoritaire et mal embouchée dont on se souvient encore en se demandant si la vie l’a changée et comment, pourquoi pas en pire comme certaines héroïnes mafflues et rancunières d’Agatha Christie ». Dès lors, j’imagine Françoise, intriguée, observant cette fille bravache, portant l’uniforme « de couleur bordeaux avec un bob à large bord », déambulant dans la cour de récréation du Cours Sévigné à Saint-Etienne où je fus moi-même élève, au même âge, quelques années plus tard…

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