Article original
Le corps en migration
Publié dans : L’autre 2006, Vol. 7, n°3
Sophie MASSOT
Sophie Massot est doctorante à l’Institut d’Etudes Politiques de Paris (recherches actuelles sur les migrations des Ouzbeks vers Moscou, Miami et Séoul). Rattachée au CERI (Centre d’études et de recherches internationales).
Pour citer cet article :
Massot S. Le corps en migration. Quitter les villages ouzbeks pour Samarkand. L’autre, Cliniques, cultures et sociétés, 2006, Vol. 7, n°3, pp. 441-455
Lien vers cet article : https://revuelautre.com/articles-originaux/le-corps-en-migration/
Le corps en migration : quitter les villages ouzbeks pour Samarkand
Le changement des manières de vivre et de penser des migrants issus des villages ouz- beks et ayant gagné la ville de Samarkand est corollaire à leur parcours migratoire. Le corps est le premier marqueur de ce bouleversement : il se détourne progressivement de l’héritage des habitudes villageoises pour devenir objet de nouvelles attentions et sujet de nouveaux désirs. Par ailleurs, il se voit orné d’agréments jugés urbains et surtout à la pointe de la mode samarkandaise. D’autres accessoires « modernes » sont eux aussi exhibés afin d’affirmer le nouveau statut social des migrants. Cependant, l’ensemble de ces acquis ne suffit pas à rassurer l’acteur qui craint que son corps, où convergent tous les regards lors des visites à la campagne, ne soit victime du « mauvais œil ». Il multiplie alors les antidotes pour conserver le bénéfice de sa nouvelle position si convoitée.
Mots-clés : exode rural, migration, urbanisation, adaptation, (techniques du) corps, ethnologie, Ouzbékistan, Asie centrale.
The migrating body. leaving Uzbek villages for Samarkand
The change in the ways of living and thinking of the Uzbek village-born migrants having left for Samarkand is corollary of their migrating journey. The body is the first marker of this deep upheaval : it is progressively diverted from the heritage of village customs to gradually become object of new attentions and subject to new desires. Besides, it is decorated with adornments considered to be urban, and, above all, up with the latest fashion in Samarkand. Other “modern” accessories are also exposed so as to affirm the new social status of the migrants. However, that whole set of achievements is not enough to reassure the protagonist who fears that his body, the focus of every glance when visiting a village, might be jinxed. He, then, multiplies the antidotes to keep the benefit of his so coveted new position.
Key words: rural exodus, migration, urbanization adaptation, (techniques of the) body, ethnology, Uzbekistan, Central Asia.
El cuerpo migrante: marcharse de los pueblos uzbekos hacia Samarkand
El cambio de maneras de vivir y de pensar de los migrantes que vienen de los pueblos uzbekos y se instalan en Samarkand, tiene conexión con su trayecto migratorio. El cuerpo es el primer marcador de este trastorno: se aleja progresivamente de la herencia de las costumbres pueblerinas para volverse objeto de nuevas atenciones y sujeto de nuevos deseos. Por lo demás, esta ornado de agremanes supuestamente urbanos y sobre todo muy de moda en Samarkand. Otros accesorios «modernos» tambien son exhibidos para subrayar el nuevo estatuto social de los migrantes. Sin embargo, la totalidad de esta experiencia no puede tranquilizar el actor quien teme que su cuerpo, donde convergen todas las miradas cuando vuelve al pueblo, sea victima del «mal de ojo». Busca entonces múltiples antidotos para conservar el beneficio de su nueva posición tan codiciada.
Palabras-claves: exodo rural, migración, urbanización, adaptación, (técnicas del) cuerpo, etnología, Uzbekistan, Asia central.
Le départ, dès 1991, de certains habitants déportés en Asie centrale sous Staline et leur retour dans leur pays d’origine ou celui de leurs aïeux, ainsi que la rentrée en Fédération de Russie de nombreux Russes ont laissé vacants beaucoup de postes et de logements dans les villes d’Ouzbékistan, devenu indépendant à la chute de l’URSS. Parallèlement à cette importante émigration, la paupérisation des campagnes croît, en raison notamment du caractère désormais obsolète du système kolkhozien, ce qui pousse les jeunes villageois vers les villes.
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