Article de dossier

© Crusty Da Klown Life and Death. Source (CC BY 2.0)

L’enfant Mort. L’enfant Vie.

Donner la parole aux enfants dans les guerres


Christian LACHAL

Christian Lachal est Psychiatre, pédopsychiatre et psychanalyste à Clermont-Ferrand, Ex-consultant International pour MSF, Chargé de cours à l'Université de Paris XIII, attaché à l'Hôpital Avicenne, Bobigny, membre du comité de rédaction de la revue L'autre.

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Autres ressources

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Pour citer cet article :

Lachal C. L’enfant Mort. L’enfant Vie. Donner la parole aux enfants dans les guerres. L’autre, cliniques, cultures et sociétés, 2020, volume 21, n°2, pp. 163-176


Lien vers cet article : https://revuelautre.com/articles-dossier/lenfant-mort-lenfant-vie/

L’enfant Mort. L’enfant Vie. Donner la parole aux enfants dans les guerres

Pris dans les guerres depuis toujours, les enfants y occupent des rôles divers, selon les circonstances. Quelle que soit leur place, ils sont marqués par l’éventualité de leur mort, et l’enfant mort fascine et afflige en même temps. Les différentes représentations, collectives ou individuelles, de l’enfant-mort nous renvoient à notre ambivalence et à l’énigme de l’émergence de la vie. Comment l’enfant peut-il conserver et retrouver en lui cette possibilité de vie ? L’auteur explore l’évolution chronologique de l’enfant, de la guerre à l’exil, de l’exil au camp de réfugiés. Les enfants réfugiés sont donc, aujourd’hui, considérés comme des survivants. Comment les aider à construire leur futur? La tendance actuelle des associations humanitaires est de s’appuyer sur les capacités d’imagination, de rêverie, de communication et de créativité des enfants. Un exemple est proposé, à partir des données de terrains évalués par l’auteur dans les camps de réfugiés congolais au Burundi et des réfugiés syriens en Jordanie et au Liban.

Mots clés : activité créatrice, aide humanitaire, enfant, exilé, guerre, interprétation psychanalytique, projection, représentation sociale, survivant.

Death-child. Life-child. Giving children a voice in war

Children have always been caught up in wars and have played a variety of roles, depending on the circumstances. Whatever their role, they carry the possibility of their death, and the death of a child is at once fascinating and distressing. The different representations, collective or individual, of the dead child remind us of our ambivalence and the enigma surrounding the emergence of life. How can a child preserve and regain this scope for life? The author explores children’s chronological trajectories, from war to exile and from exile to refugee camps. Today, refugee children are considered as survivors. How can we help them build their future? The current trend in humanitarian associations is to build on children’s imagination, their dreams, their communication and creativity. This is illustrated here from fieldwork conducted by the author in congolese refugee camps in Burundi and syrian refugee camps in Jordan and Lebanon.

Keywords: child, creative activity, exile, humanitarian aid, projection, psychoanalytic interpretation, social representation, survivor, war.

El niño Muerte. El niño Vida. Darle a los niños una voz en la guerra

Dependiendo de las circunstancias, los niños ocupan roles diversos en las guerras que han estado padeciendo desde siempre. En cualquier caso, los niños están marcados por la posibilidad de su muerte. El niño muerto provoca fascinación y aflicción al mismo tiempo. Las diferentes representaciones, colectivas o individuales, del niño muerto nos remiten a nuestra ambivalencia y al enigma del surgimiento de la vida. ¿Cómo puede el niño mantener y encontrar en él esta posibilidad de vida? El autor explora la evolución cronológica del niño, de la guerra al exilio, del exilio al campo de refugiados. Actualmente los niños refugiados son considerados como sobrevivientes. ¿Cómo ayudarlos a construir su futuro? La tendencia actual de las Asociaciones Humanitarias es confiar en las capacidades de imaginación, comunicación y creatividad de los niños. Se propone un ejemplo, basado en datos de experiencias de terreno evaluadas por el autor en los campamentos de refugiados congoleses en Burundi y de refugiados sirios en Jordania y Líbano.

Palabras claves: actividad creativa, ayuda humanitaria, exilio, guerra, interpretación psicoanalítica, niño, proyección, representación social, sobreviviente.

Dans la guerre, on imagine l’enfant, on le voit mais on ne lui donne pas la parole. En 1895, Marcel Schwob écrivait La croisade des enfants, un OVNI littéraire d’une profonde et cruelle beauté. En fait, les historiens qui l’ont documenté savent peu de choses sur cet événement. En 1212, ce mouvement populaire, déclenché simultanément dans la région parisienne, en Rhénanie puis en Italie du Nord, était composé surtout de ruraux et de laïcs. Ils ne furent pas immédiatement reconnus comme croisés par l’Église, mais le rassemblement spontané de groupes de plus en plus nombreux qui processionnent sans chef, selon le rite du clamor, comprend en premières lignes des pueri (jeunes, adolescents) et puelle (jeunes femmes). Ils produisent des miracles. Les chants et les slogans de ces foules permettent de comprendre l’évolution psychosociale de ce mouvement, dont le but devient assez rapidement d’aller en Terre promise et de reprendre aux Musulmans la vraie croix.

Cette « croisade des enfants » est devenue un mythe : celui des enfants victimes et acteurs dans les guerres. Le livre de Marcel Schwob réunit des points de vue divers sur ces pueri, mais donne aussi la parole aux enfants : « Nous trois, Nicolas qui ne sait point parler, Alain et Denis, nous sommes partis sur les routes pour aller vers Jérusalem […] Ce sont des voies blanches qui nous ont appelés dans la nuit ». Ce sont surtout les derniers instants d’enfants avant leur mort que décrit Schwob. Au fond, la croisade donne des représentations de l’enfant dans la guerre : enfants croisés, enfants pris par le religieux, la croyance, enfants singuliers qui font des miracles, enfants victimes et enfants résilients, qui supportent tout jusqu’à en mourir. Et le récit leur donne aussi la parole, il tient compte de leur « maigre témoignage ».

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