Dossier

Anna+Elena Balbusso Source D.G.

Aux risques de l’empathie

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L’écoute des cliniciens est parfois confrontée à des situations qui mettent en défaut leur engagement et leurs idées de ce qu’ils pensent être juste. La question des limites personnelles comme la capacité à l’empathie, mais aussi professionnelles et institutionnelles, se pose alors. Et lorsque cette écoute est confrontée à des traumas d’une extrême violence dans la mesure où le(s) sujet(s) a (ont) participé à la transgression de tabous, et/ou à des actes et/ou des paroles qui ont attaqué les fondements mêmes de l’humanité, le socle sur lequel le clinicien s’appuie habituellement vacille, le renvoie à des interrogations existentielles, au point de remettre en question sa position de clinicien et d’Etre Humain. Si son orientation professionnelle est assumée, même si elle est complexe, face à la douleur extrême de la victime, qu’advient-t-il lorsqu’une victime que nous accompagnons a elle-même perpétré des actes qui vont à l’encontre de nos valeurs ? Lorsque celui qui était victime fût aussi bourreau ? L’écoute et/ou le suivi psychothérapeutique continuent-t-ils de la même façon ? Et d’ailleurs est-ce possible ?

Comment faire face à cette violence transgressive et nous en défendre pour reprendre pied dans l’exercice de la psychothérapie ? Que devient alors notre empathie ?

Ce n’est pas une question que l’on peut simplifier. L’évidence-même du concept d’empathie ne résiste pas à une telle rencontre. L’analyse du contre-transfert suppose alors un effort, une acceptation ou un refus qui vont au-delà (ou au cœur ?) de l’histoire personnelle du thérapeute.

L’empathie, écrit Nicolas Georgieff, ne se décrète pas. Elle est obligatoire et inconsciente, et (se) construit (dans) l’intersubjectivité. Ce sont les réactions à l’empathie qui nous sont accessibles et permettent de mesurer comment nous réagissons à la vie mentale de l’autre et à son partage ! Or notre monde psychique est fabriqué à partir d’un système de représentations et de croyances profondes façonnées par notre culture et notre histoire collective, nos expériences personnelles et professionnelles !

C’est pourquoi, les cliniciens ici convoqués, ont nourri leurs réflexions d’un rappel des lois universelles avec Christian Lachal, de l’histoire de la psychanalyse avec Yann Zoldan, et de la construction de l’emprise mentale avec Véronique Huqueleux. Tous ont le courage d’aller aux limites de leur position, de déconstruire leur contre-transfert culturel, de congédier la morale, pour conclure sur une position d’éthique et de responsabilité.

Ce dossier témoigne de l’âpreté de la question, de la traversée de l’humain dans ses pires tendances et des limites douloureusement ressenties du psychothérapeute.