Article de dossier

© Jacques Lombard, le fil de la vie (gauche), Vénus Sakalava (droite) Source D.G.

« J’ai mal aux os ».

Rituels, imaginaire partagé et changement social

et


Jacques LOMBARD

Jacques Lombard est anthropologue et cinéaste à l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD), 44 Boulevard de Dunkerque, 13572 Marseille Cedex 02.

Michèle FIÉLOUX

Michèle Fiéloux est anthropologue et réalisatrice au Laboratoire d’Anthropologie sociale (CNRS), Collège de France, 52 rue du Cardinal Lemoine, 75005 Paris.

Bloch M. La violence du religieux. Paris: Odile Jacob; 1997.

Faublée J. Les esprits de la vie à Madagascar. Paris: PUF; 1954.

Fiéloux M. Femmes, terre et bœufs. In: Fiéloux M., Lombard J. Elevage et société. Tananarive MRSTD-Orstom; 1988. p. 145-162.

Fiéloux M, Lombard J. Le bilo du coton ou la fête de l’argent. Les dynamiques internes de la transformation sociale. Cahier des Sciences humaines 1989; 25: 499-511.

Fiéloux M, Lombard J. Le fil de la vie. Film 15’. Coproduction ORSTOM/MRSTD Madagascar; 1986. http://vimeo.com/28012286

Fiéloux M, Lombard J. L’histoire d’une femme ou la maladie du bilo. Film 28’. Coproduction ORSTOM/MRSTD Madagascar; 1987.

Goedefroit S, Lombard J. Andolo. L’art funéraire sakalava à Madagascar. Paris: Biro; 2007.

Héritier F. Masculin/féminin. La pensée de la différence. Paris: Odile Jacob: 1996.

Lombard J. Le royaume Sakalava du Menabe. Essai d’analyse d’un système politique à Madagascar, 17è-20è. Paris: ORSTOM, «Travaux et Documents n° 214»; 1988.

Ottino P. Les champs de l’ancestralité à Madagascar. Parenté, alliance et patrimoine. Paris: Karthala-Orstom; 1998.

Rouget G. La musique et la transe. Paris: Gallimard; 1990.

Xanthakou M. L’inceste: rêves et réalités. In: Héritier F, Cyrulnik B, Naouri A. De l’inceste. Paris: Odile Jacob; 2000. p. 172-212.

Zempleni A. Des êtres sacrificiels. In: Cartry M. Sous le masque de l’animal. Essais sur le sacrifice en Afrique noire. Paris: PUF; 1987. p. 267-315.

Pour citer cet article :

Lombard J, Fiéloux M. « J’ai mal aux os ». Rituels, imaginaire partagé et changement social. L’autre, cliniques, cultures et sociétés, 2012, volume 13, n°1, pp.41-50


Lien vers cet article : https://revuelautre.com/articles-dossier/jai-mal-aux-os/

« J’ai mal aux os ». Rituels, imaginaire partagé et changement social

La question du sentiment religieux est bien au cœur de la relation du sujet à son espace social. Conviction vécue au plus profond des consciences individuelles qui nourrit dans le même temps le sentiment de l’appartenance à une même communauté. Le rituel malgache du bilo nous permet de nous interroger sur la plasticité d’un tel sentiment en approchant l’expérience des membres, jusqu’à six générations, d’un même lignage agnatique, défunts et vivants, regroupés à cette occasion avec leurs alliés de toute nature. Tous portés et définis en quelque sorte par une mémoire partagée fondée sur une multiplicité d’éléments factuels et symboliques, d’images qui sont des amorces de l’imaginaire.

Mots clés : Bilo, filiation, groupe d’appartenance, Madagascar, rite, société patriarcale.

«My bones hurt». Rituals, shared imaginary and social change

The question of religious feelings is at the heart of the relationship of the human being with its social space. This conviction is lived within the individual conscience and nourrishes at the same time the feeling of belonging to a same community. Through the madagascan ritual of bilo we question the plasticity of such a feeling and approach the experience six generations of members of one agnatic lignage, dead and living, united on this occasion with all sorts of allies. All are carried by a shared memory built on multiple symbolic and factual elements and on images which are starters of the imaginary.

Keywords: Bilo, filiation, group of belonging, Madagascar, patriarcal society, rituals.

«Me duelen los huesos». Rituales, imaginario compartido y cambio social

La cuestión del sentimiento religioso es primordial en la relación del sujeto a su espacio social. Es una convicción vivida desde lo más profundo de las consciencias individuales que alimenta al mismo tiempo el sentimiento de pertenencia a una misma comunidad. El ritual malgache del bilo nos permite interrogarnos sobre la plasticidad de un sentimiento tal a través del abordaje de la experiencia de los miembros de la comunidad, por hasta 6 generaciones del linaje paterno, difuntos y vivos, reunidos a esta ocasión con sus aliados de toda índole. Todos ellos incluidos y definidos por una memoria compartida fundada sobre una multiplicidad de elementos de realidad y simbólicos, de imágenes que son un reflejo de lo imaginario.

Palabras claves: Bilo, filiación, grupo de pertenencia, Madagascar, rito, sociedad patriarcal.

Vivre un événement, une rencontre, un souvenir, c’est développer une intelligence du monde d’une manière spécifique dans un corps à corps quotidien, chacun par rapport à soi, à l’autre, aux autres dans chaque moment, au fil du temps.

La question de l’invisible dans l’imaginaire social, de l’image quelle qu’elle soit comme amorce de l’immensité inépuisable du monde ouvre un espace de communication où peut s’exprimer le sentiment religieux.

C’est bien ce qui se passe dans le bilo, rituel malgache très ancien où ce que chacun peut comprendre de l’ordre du monde passe par la déclinaison subtile d’images partagées à travers un sentiment commun réinitialisé dans chaque variante nouvelle de ce rituel. Le lignage ici n’est pas une catégorie anthropologique, mais le ressenti d’un sentiment d’appartenance vécu dans toutes les phases de la performance de ce rituel où s’opère la meilleure cohabitation qui soit avec les défunts : la promesse des naissances, de tous les enfants à venir.

Ainsi cet exemple malgache illustre à sa manière cette éternelle contradiction, la reconstruction nécessaire du réel dans le discours, scientifique comme politique, mais qui ne l’épuisera jamais et le simple mouvement de la vie, l’intelligence de notre être au monde et sa mise en forme concomitante qui fait justement l’objet de ce discours.

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