Article de dossier

© Basyrov G. De la série "Les dialogues", 1980. Musée de l'association Mémorial. Source D.G.

Gariff Basyrov : les images de l’oubli


Alina GLADYSHEVA

Alina Gladysheva est doctorante en CERCEC (EHESS).

Clair J. Autoportrait au visage absent. Ecrits sur l’art 1981-2007. Paris : Gallimard ; 2008.

Chalamov V. Récits de la Kolyma (trad. par S. Benech, C. Fournier, L. Jurgenson). Paris : Verdier ; 2003.

Chevalier J, Gheerbran A. Dictionnaire des symboles. Paris : Robert Leffont/Jupiter ; 1991.

Dell’Asta M, Scaraffia L. La vita di sguardo. Le vittime del Grande Terrore staliniano. Torino: Lindau; 2012.

Deti GULAGa: 1918-1956 (Les enfants de Goulag: 1918-1956). Moscou: MFD; 2002

Frierson CA, Vilensky SS. Children of the Gulag. New Heaven-London : Yale University Press ; 2010.

Gariff Basyrov. Grafica. Katalog vystavki (Gariff Basyrov. La graphique. Le catalogue de l’exposition). Moscou : Sovetskij hudožnik ; 1991.

Kizny T. La Grande Terreur en URSS 1937-1938. Paris : Les éditions noir sur blanc ; 2013.

Kuznecova E. Karlag po obe storony koluchki (Le Karlag des deux coté des barbelés). Sourgout : Defis ; 2001.

Les mots d’un historien. Sous la direction de N. Offenstadt, G. Dufaud, H. Mazurel. Toulouse : Presses Universitaires de Mirail ; 2006.

Levinas E. Entre nous. Essais sur le penser-à-l’autre. Paris : Bernard Grasset ; 1991.

Moine N. «Le passeport intérieur soviétique à l’époque stalinienne» dans Xavier Crettiez Du papier à la biométrie; identifier les individus. Paris : Presses des Sciences Po ; 2006.

Rizzolatti G, Sinigaglia C. Mirroires in the brain. How our minds share actions and emotions. New York : Oxford University Press ; 2008.

Roudinesco E, Plon M. Dictionnaire de la psychanalyse. Paris : Fayard ; 1997.

Vsâ naša žizn’; Vospominanija Galiny Ivanovny Levinzon i rasskazy zapisannye ej. (Toute notre vie; Mémoires de Galina Ivanovna Levinzon et les récits qu’elle a collectés). Moscou : Mémorial ; 1996.

Vygotski LS. Istoriâ razvitiâ vysših psihičeskih funkcij (Histoire du développement de fonctions psychiques supérieures). Moscou : Pedagogika ; 1985

Zaltzman N. De la guérison psychanalytique. Paris : PUF ; 1998.

Pour citer cet article :

Gladysheva A. Gariff Basyrov : les images de l’oubli. L’autre, cliniques, cultures et sociétés, 2017, volume 18, n°1, pp. 67-76


Lien vers cet article : https://revuelautre.com/articles-dossier/gariff-basyrov-images-de-loubli/

Gariff Basyrov: les images de l’oubli

L’article porte sur le destin du peintre soviétique Gariff Basyrov (1944-2004) et sur ses tentatives de reconstruire, au moyen de l’art, l’expérience perdue de sa propre naissance et petite enfance au sein du Goulag. Quand nous pensons aux œuvres d’art crées dans le cadre d’un système autoritaire, on peut mobiliser la notion de l’idéologie apophatique (J.Clair), l’idéologie effaçant les traits individuels, jusqu’à privation de la vie même. Cet effacement de traits personnels apparaissait dans certaines pratiques des régimes totalitaires. Le visage comme symbole de l’individu s’efface pour devenir un masque mortuaire. Amnésique vis-à-vis de son expérience personnelle, Gariff fait le parcours ontologique de restitution de la dignité de visage humain (E. Levinas) pour passer au dialogue avec l’Autre. Pour étudier le travail de construction mémoriel, individuel et collectif, je m’appuierai sur les œuvres laissées par G. Basyrov et sur les interviews avec les proches de G. Basyrov.

Mots clés : 20e siècle, amnésie infantile, art, camp de concentration, Gariff Basyrov, histoire familiale, mémoire, objet, peinture, pulsion de mort, regard, totalitarisme, URSS, visage.

Gariff Basyrov: the images of oblivion

The present article is dedicated to the life of the Soviet painter Gariff Basyrov (1944-2004) and to his attempts to revive in memory, by means of art, the lost experience of his birth and childhood in Gulag. When we think of works of art, created in a totalitarian regime, we can refer to the concept of “apophatic ideology” (J. Clair); the ideology that wipes away individual traits, up to killing the whole person. We can see this annihilation of individuality appears in some practices of totalitarian regimes. The face, as a symbol of of individuality gives way to being replaced by a death mask. Amnesic towards his personal experience, Gariff made by means of his art an ontological pathway of reconstructing the human face’s dignity (E. Levinas) for passing to dialog with the Other. For studying this work of a memory reconstruction, collective and individual, we based our study on the works left by Basyrov and on the interviews with G. Basyrov’s relatives.

Keywords: 20th century, art, childhood amnesia, concentration camp, death drive, face, family history, Gariff Basyrov, memory, object, painting, regard, totalitarianism, USSR.

Gariff Basyrov: las imágenes del olvido

El artículo se interesa en el destino del pintor soviético Gariff Basyrov (1944-2004) y en sus tentativas de reconstruir, por medio del arte, la experiencia perdida de su propio nacimiento y de su infancia temprana en un Goulag. Cuando pensamos en las obras de arte creadas en el contexto de un sistema autoritario, la noción de la ideología apofática (J. Clair) que borra las características individuales hasta el extremo de una privación de la vida misma, es pertinente. Esta negación de los rasgos personales aparece en ciertas prácticas de los regímenes totalitarios. El rostro como símbolo del individuo se borra para volverse una máscara mortuoria. Con una amnesia de su experiencia personal, Gariff hace el recorrido ontológico de restitución de la dignidad del rostro humano (E. Levinas) para pasar al diálogo con el Otro. Para estudiar el tarbajo de construcción de memoria, individual y colectivo, me apoyaré en las obras realizadas por G. Basyrov y en las entrevistas con personas cercanas a él.

Palabras claves: amnesia infantil, arte, campo de concentración, Gariff Basyrov, historia familiar, memoria, mirada, objeto, pintura, pulsión de muerte, rostro, totalitarismo, URSS.

Cet article est consacré à la tentative de reconstruction de la mémoire perdue d’une expérience de violence vécue pendant l’enfance. Il ne traite pas des violences individuelles, mais de violences exercées sur un grand nombre de personnes par le système autoritaire. Cet article traite ainsi les enfants nés dans les camps du Goulag soviétique.

L’ampleur de la violence vis-à-vis des enfants en URSS à l’époque soviétique a conduit certains historiens à poser la question d’une victimisation intentionnelle des enfants (Frierson & al 2010 : 12). Grand nombre d’enfants ont partagé le destin de leurs parents : parfois déportés ou arrêtés avec leurs parents, ils étaient plus souvent encore envoyés dans des orphelinats. Certains enfants, venus eu monde au Goulag, ont été marqué par le destin de leurs mères, en le partageant du point de vue du travail mémoriel, le cas les enfants nés au Goulag est le plus difficile à étudier, puisque l’organisation même de la vie des enfants nés ou Goulag, était destinée à provoquer leur amnésie1.

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  1. A partir de septembre 1940 la décision du NKVD obligeait le département sanitaire de GULAG de se débarrasser des enfants à l’âge de 1,5-2 ans « quand ils n’ont plus besoin du lait maternel », en les envoyant à la famille de la détenue ou aux garderies de la Santé Publique (Deti GULAGa 2002 : 343).

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